Scottish rhapsody | Une accumulation de tropes dans un récit creux


J’ai commencé 2023 avec l’envie de découvrir plus de romances. Ayant également prévu un séjour à Édimbourg, capitale de l’Écosse, Scottish rhapsody était le roman qu’il me fallait puisqu’il s’agit d’une romance se déroulant dans les Highlands ! Ni une, ni deux, je me suis lancée. Si le roman est effectivement rapide à lire, il n’est malheureusement pas convaincant. Laissez-moi vous expliquer pourquoi je n’ai pas du tout adhéré à ce roman…

Erynn Wallace avait depuis longtemps oublié que l’Écosse coulait dans ses veines. Grandir à Londres auprès d’une mère anglaise ne l’a sans doute pas aidée à cultiver ses racines… Mais en retournant dans son village natal pour l'enterrement de son grand-père, elle ne pensait pas se sentir aussi dépaysée. Les gens, l’accent, les coutumes… elle a tout oublié. Et ce n’est pas Lachlan Cameron qui risque de la mettre à l’aise.
L’héritier du clan des Cameron semble même la traiter avec un dédain particulier. Il ne voit en elle qu’une opportuniste, venue rafler son héritage avant de repartir chez l’ennemi. Qu'importe à Erynn l’avis de cet inconnu, certes séduisant, mais parfaitement désagréable ?
Ce qui est certain c'est qu’il serait beaucoup plus facile de l’ignorer si, pour préserver le domaine de ses ancêtres, elle n’était pas contrainte de l’épouser…

Pas besoin d’aller bien loin pour que les choses me déplaisent ! J’ai littéralement commencé à grincer des dents à la seconde page ; plus précisément dès le tout premier échange du roman. Le voici retranscrit, mot pour mot. Pour avoir une idée du contexte, le personnage principal s’apprête à passer un entretien d’embauche dans une grande entreprise et se dirige vers un ascenseur.

«
- Salut, beauté.
- Bon sang, vous êtes dingue, vous m’avez fait la peur de ma vie !
- Désolé. Vous êtes nouvelle, n’est-ce pas ?
- Bien vu Einstein !
- Vous êtes libre ce soir ?
- Ça dépend, vous proposez quoi ?
- Deux japonais et un orgasme. Trois si vous êtes sage. »

Non mais… Au secours ! C’est absolument gênant et déplacé de se faire appeler “beauté” au boulot, d’autant plus quand la personne qui le fait n’est autre que le fils du patron. Si ce manque de respect et cette tentative de drague bien lourde m’a marquée, j’ai suffoqué quand j’ai lu la dernière phrase - outre l’aspect très prétentieux de la promesse d’orgasme, c’est surtout la pose de conditions qui me choque ; je la trouve très problématique. Une femme n’a pas à “être sage” pour prendre du plaisir au lit, en tout cas pas en 2021 (date de publication du roman). 

Rappelons donc que tout ceci se déroule dans le premier chapitre. Avec espoir, j’ai pensé que la suite serait différente... Après tout, le résumé nous promet de voir l’Écosse et ses paysages, les clans écossais, leurs coutumes et les relations entre ces clans. Le contexte étant le suivant : pour sauver son clan, Eryn se voit obligée de se marier avec Lachlan, héritier d’un clan bien plus puissant que celui de son père. L’idée de Delinda Dane tient plus ou moins la route… sauf qu’elle repose sur une base pleine d’incohérences. La plus grosse étant le sacrifice d’Eryn, qui abandonne sa liberté pour effacer l’ardoise de son grand-père, très endetté auprès de la famille Cameron. Selon elle, il n’est pas question de sacrifice ni même de choix à effectuer car elle estime devoir tout faire pour protéger sa famille… mais quelle famille ? Quel clan ? Jamais nous n’avons d’informations sur le clan Wallace. Il ne m’a pas semblé qu’il s’agissait d’une grande famille, ni d’un clan important. Le père d’Eryn est à priori le seul à gérer son exploitation : on repassera pour les enjeux…

Par la suite, j’ai surtout été dérangée par la romance entre Eryn et Lachlan qui se déroule beaucoup trop vite. Ils se détestent de tout leur cœur sans réelle raison ; ils s’envoient des piques sans essayer d’apprendre à se connaître, puis d’un coup, hop ! Leur libido explose, et les voilà inséparables, fous amoureux, prêts à tout l’un pour l’autre. Jusqu’à une crise de la part de Lachlan, qui n’a encore une fois aucun sens, et bien sûr, n’apporte rien au roman car elle était très prévisible. Le tout étant saupoudré de remarques problématique ou très gênantes, voir les deux à la fois. C'est parti pour l'énumération :

« Un cri meurt dans ma gorge quand une main puissante me couvre la bouche, tandis qu’une autre s’arrime à ma hanche, l’haleine chargée d’alcool de mon assaillant me brûle les yeux alors que j’essaye de me dégager en vain. […]
(Lachlan :) - La peur de ta vie, hein ? Imagine un peu si c’était quelqu’un d’autre qui t’avait trouvé ? Le château grouille de mecs en rut, au cas où tu l’aurais oublié ! À moins que ce soit ce que tu cherches ? »
Ici, on comprend clairement que l’auteur essaye de dresser un portrait de Lachlan valorisant, en montrant son côté protecteur. Personnellement, je trouve ça très maladroit : ne serait-il pas en train de menacer Eryn, en lui disant qu’elle risque de se faire violer ? Et en plus, il lui reproche de chercher à se faire violer ?!

« Elle éclate de rire et chacun de ces éclats se logent dans ma poitrine. Ebloui par sa beauté et par ce son cristallin, je me surprends à vouloir la voir heureuse plus souvent. Tout le temps, en fait. »
J'avoue, c'était juste pour le plaisir de vous montrer à quel point ce passage sonne complètement exagéré. Personne ne rit d’un “son cristallin” - prévenez-moi si vous connaissez quelqu’un ! On enchaîne avec une remarque de Lachlan qui indique clairement qu’il est surpris de vouloir rendre Eryn heureuse… bon, ça me paraît logique lorsqu'on est amoureux de quelqu'un, mais passons.

Continuons avec quelques petits extraits décrivant Lachlan :
« [...] déclare-il en croisant ses longues jambes musclées, moulées dans un jean noir. »
« J’évite de loucher sur ses biceps tendus aux veines saillantes »
En lisant le roman, j'ai eu l'impression que Lachlan contractait ses muscles en permanence (quand je vous parlait d'exagération). Et on continue avec celle-ci qui m’a bien fait rire aussi :

« Il se meut avec tant d’aisance… Les autres participants font pâle figure à côté de lui. Avec son kilt, ses cheveux longs et son corps d’Adonis, il me fait penser un gladiateur tout droit débarqué de la Rome antique, prêt à faire chavirer le cœur de n’importe quelle jeune vierge naïve et énamourée. »
Big up aux jeunes vierges naïves et énamourée… C'est toujours agréable de lire des paroles dévalorisantes à propos des femmes, surtout quand c'est écrit par une femme.

« Texture écœurante”, “mouvement de recul”, “dégoûté”, “révulsion »
Voici tous les mots et expressions décrivant la cicatrice que porte Lachlan sur la joue. Pourtant, avoir une cicatrice, c’est normal : j’ai une pensée pour les lecteurs ayant justement des cicatrices, je ne suis pas sûre que de tels qualificatifs soient valorisants et boostent la confiance en soi.

Enfin, on passe aux classiques : l’exagération des scènes de sexe, qui ne reflètent pas la réalité :
« Soudain, tout explose autour de moi, et mon âme, s’éparpille en pluie d’étoiles scintillantes. »
Une pluie d’étoiles scintillantes, sérieux ?
« C’est comme si Lachlan et moi étions connectés à un niveau cosmique. Le sexe avec mon mari est démentiel. »
Notre bonne vieille amie l'exagération est déjà de retour !
« Je suis à toi, mes doigts, ma queue, tout est à toi ! »
Quel poète ce Lachlan.
« Bébé, tu as changé mon monde. Tu as apporté ta lumière dans mes ténèbres. »
De rien, bébé. Il suffisait de changer l’ampoule.

« Je n’ai jamais connu une baise aussi exceptionnelle avec une autre. D’habitude, mon schéma de fonctionnement est basique. Je veux, je prends. Simple et efficace. »
On commence avec un truc marrant, encore de l'exagération... et puis là... Simple, efficace, comme les violeurs ! Heu pardon, les mecs torturés qui ont un passé compliqué. J'ai bien cru m'étouffer en lisant cet extrait. Je veux, je prends ? Ai-je besoin d’expliquer l’aspect problématique de cette phrase ?

Breeeeeeef ! Je vais m'arrêter là, vous aurez compris à quel point ce livre m'a horripilé. En ce moment, la mode sur instagram, c'est de lister toutes les "tropes" que contient un roman (et en anglais, parce que pourquoi pas. Ici, on a du ennemies to lovers, du forced proximity, arranged wedding, sunshine x happy... Oui, on est d'accord, ça ne veut pas dire grand chose ! Pour moi cela démontre que le roman ne repose pas sur grand chose si ce n'est essayer de se conformer aux tendances. On obtient ainsi un récit incohérent, peu intéressant, qui manque cruellement de contexte, et qui en plus exaspère avec toutes ses remarques problématiques... J'ai détesté !


En quelques mots :
+ rien
- remarques problématiques, pas de contexte

Ma note : 1/5


Scottish rhapsody | Delinda Dane
lu en février aux éditions Hugo Roman

10 commentaires:

  1. Oh, je vais vite éviter ce livre 😉

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  2. C'est tellement dommage parce que le cadre de l'Ecosse donnait vraiment envie mais entre la romance incohérente et les extraits partagés, je vais passer mon tour... Et je crois que je vais rester sagement à mes romances historiques ou de fantasy.

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    1. Oui c'est vraiment regrettable, d'autant plus que l'Ecosse a l'air d'être un pays magnifique ! J'ai visité Edimbourg et j'ai adoré, donc j'étais déçue de ne pas retrouver ça dans ce roman.

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  3. C'est mal si j'adore lire tes retours sur les romances, tout en râlant clairement sur les mêmes passages que toi ? ^^ Clairement, je passe mon chemin, mais j'ai bien rigolé grâce à tes commentaires.

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    1. Ah ah, j'adore ton commentaire 😂 Si ça peut te rassurer, ça m'amuse aussi un peu de répertorier tous ces passages, même si c'est très frustrant de les trouver au départ dans un roman !

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  4. Ah, ah ^^ Je vois qu'on a eu les mêmes réactions urticantes :D Je suis totalement et complètement d'accord avec ton avis sur ce livre, tout était bancal à souhait, avec des idées dangereuses derrières des thématiques / enjeux / idées qui pourtant pouvaient être traités avec gravité et humour sans sombrer dans le glauque et le gênant. Le voyage en Ecosse n'était pas assez présent, peu de choses sur la culture, l'histoire du pays, c'était juste un prétexte, tu as tout liste et détaillé ce qui m'a dérangé tout au long de ma lecture.

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    1. Mdrrr, urticante, c'est le mot 😆
      Et vraiment, c'est super dommage pour l'Écosse, c'est tellement mis en avant dans le résumé, sur la couverture, sur les réseaux sociaux... bref partout mais pas dans le livre ahah !

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  5. Le coup du rire cristallin, je l'ai vu plusieurs fois dans des livres 😅
    Bon ce livre me tentait bien mais j'avoue qu'il y a quelques passages problématiques notamment concernant les allusions au viol.

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    1. En vrai, malgré ma chronique incendiaire, je t'encourage à le lire! Peut-être que tu verras les mêmes propos problématiques que moi... il n'y a que comme ça que d'autres lecteurs (plus jeunes notamment) s'en rendront compte !

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Créé par Pauline LF. Fourni par Blogger.