Gris comme le coeur des indifférents | Récit court et crève-coeur


Dire qu'on m'a recommandé ce livre est un euphémisme ! Damien, alias @damschronicles sur Instagram, a longuement vanté les mérites de ce livre, le présentant comme l'une de ses meilleures lectures de 2023. Le hasard a bien fait les choses puisque j'ai croisé le roman sur les étagères de la médiathèque, comme s'il n'attendait que moi pour être emprunté. Alors, verdict ?

« Hier, Papa a frappé Maman. C’était un jour banal, plombé seulement par la couleur du ciel et les hurlements. Un jour gris. Gris comme le cœur des indifférents. »

Les violence faites aux femmes surgissent partout, tout le temps. C'est l'affreux constat, aussi terrible qu’écœurant, que je fais en parcourant mes lectures de ce début d'année. Trois livres, trois pays, trois récits aussi éloignés les uns des autres et pourtant un dénominateur commun : des femmes qui souffrent. Elles sont rabaissées, humiliées, défigurées, violées, battues, et tuées pour certaines. Bien sûr, en tant que lectrice je suis évidemment impuissante ; mais la cruauté de la chose réside dans ce fait : l'impuissance semble être la seule réaction face à ces comportements violents - “Gris comme le cœur des indifférents” le démontre. Votre mari vous bat ? Déposez donc une main courante, on vous recontactera quand vous serez assassinée. Je grossis les traits, mais concrètement, c’est ce qui se passe en France de nos jours.

Revenons au roman qui, je vous l'assure, ne vous laissera pas indifférentes (ah, quel mauvais jeu de mots !). Si La plume de Pascaline Nolot m’était inconnue, elle m'a rapidement convaincue et j’ai dévoré le livre - d’autant plus que vu sa taille, il a surtout des airs de nouvelle. En plus, l’autrice allie de façon très juste couleurs et horreurs : murs blancs, blouse rose, jour noir, médaille dorée, rouge sang. Et le gris de l'indifférence.

Il ne l’a jamais su, mais elle l’a convaincu de me prénommer Lyra en hommage à l’héroïne de Philip Pullman dans À la croisée des mondes, sublime cycle de fantasy. Ce fut le dernier acte de résistance littéraire de ma mère – qui vivra avec moi -, au nez et à la barbe de mon père.

Ah qu'il est terrible de lire ce roman, narré par une enfant qui assiste à un spectacle macabre… comme leurs voisins, on voudrait bien tourner les yeux et fermer les oreilles. Mais comment le faire alors que le phénomène a tant d'ampleur ? Pourquoi vouloir ignorer toute cette violence alors qu'en deux mois et demi seulement, en France, 23 femmes ont été tuées pour leur genre (chiffres de Nous Toutes) ? Ici, Pascaline Nolot donne la parole aux victimes collatérales de ces violences conjugales en mettant en scène une adolescente et ses deux petits frères. Je ne suis pas sûre d'avoir les mots pour décrire une telle situation et pourtant elle existe : “Gris comme le cœur des indifférents” le rappelle et le met en avant.

Quelques jours après avoir lu ce roman, je pose à nouveau mon ressenti sur le papier : j'ai eu l'impression que ma chronique partait dans tous les sens : c'est là l'effet, le pouvoir même, de ce court roman pourtant bouleversant. La plume astucieuse parlera aux plus jeunes tandis que son ton mature lui permettra d'être lu par les plus âgés. Bref, je vous le conseille grandement, tout en vous mettant en garde les âmes les plus sensibles !

Ma note : 4/5


Gris comme le coeur des indifférents | Pascaline Nolot
lu en février 2024 aux éditions Scrineo

9 commentaires:

  1. Ce roman a l'air poignant et fort, je ne connaissais pas ce titre, mais je suis curieuse, j'aimerais bien le lire un de ces jours. Merci pour cette découverte.

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    1. Très contente de te le faire découvrir :) Il est super court, tu vas le dévorer !

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  2. J'ai déjà vu passer ce roman, mais sans m'attarder spécialement sur son résumé. C'est maintenant chose faite et il arrivera sans doute dans ma PAL un jour ou l'autre. Un sujet fort sur lequel j'ai lu le mois dernier, avec Point de fuite de Marie Colot & Nancy Guilbert.

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    1. Je ne connaissais pas Point de fuite ! J'ai dû louper ton avis, je vais filer voir !

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  3. J'ai repéré ce roman sur la blogosphère et vu la dureté du sujet, je n'ose pas l'emprunter alors qu'il me fait envie. Ta chronique m'a donné des frissons, peut-être que je craquerais, pour découvrir enfin les mots de Pascaline Nolot sur ce sujet. J'avais déjà lu cette auteure il y a plusieurs années avec "Sur l'écochure de tes mots" que j'avais bien apprécié. Mais ici, le sujet est bien plus rude, merci pour ton avis Pauline.

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    1. Si ça peut te rassurer : il est destiné à un public 'jeune', alors il est relativement soft même si forcément très touchant. De mon côté je ne connaissais pas plus que ça l'autrice, alors je vais filer voir le livre que tu as mentionné !

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    2. C'est un jeunesse aussi pour le roman "Sur l'écorchure de tes mots" 🙂 J'espère que tu l'apprécieras aussi si tu le découvres !

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  4. Le thème est forcément très intéressant et je me le note immédiatement en lisant ton avis. Et, surtout j'aime beaucoup le titre que je trouve très beau.

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    1. Merci pour ta confiance, j'espère que ce livre te touchera autant que moi !
      Je suis d'accord, le titre lui va comme un gant.

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Créé par Pauline LF. Fourni par Blogger.